lundi 22 janvier 2018

idées courtes # 26


Le silence est parfait, on entend les mouches ne pas voler. 
  
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Tourner sept fois son pinceau dans…

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L’encre ne cache rien, ne ment jamais, on y décèle absolument tout, le geste, la reprise, l’intention, l’hésitation, l’élan, la peur. On peut même y lire l’avenir.

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Le vent souffre

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Des clés pour la peinture ? Point trop n’en faut, un trousseau serait encombrant, lourd et passablement bruyant.

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La tête piquée d’épingles

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On ne noiera jamais le poisson dans l’encre

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Un prêté pour un rendu : une volée de cloches aux heures de prière n’appelle de ma part, en retour, qu’une volée de bois vert.

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Il ne suffit pas pour poétiser d’associer des mots de manière hermétique, aléatoire, absconse, surréaliste, inponctuée, en leur donnant des airs. Quelle poésie si on ne devine pas entre les caractères s‘ouvrir une fêlure ou s'esquisser un secret ?  Si, à deux doigts qu’on était de découvrir le mystère, on ne le sent pas se dérober toujours, filer entre les lignes ? Cette lecture en quête de trésor (et non de compréhension) ouvre un espace au mouvement de la pensée, à son errance. Non, il ne suffit pas pour poétiser de mettre bout à bout des mots — noirs ou jolis, peu importe — en inversant queue et tête, quand elles existent, même si la queue rime et de pieds nous avons le compte.

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Elle a presque cinquante ans, un mari qui travaille pour deux, elle s’ennuie au foyer, décide de s'adonner à la peinture abstraite. Elle réalise alors des taches ménagères.

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Faire son deuil, c’est déposer les larmes (il est des sources qui ne s’assèchent jamais). 

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Famille, faille, à une lettre près


Il est des faux-peintres comme des faux-poètes : ceux-là posent des couleurs sur une surface imperméable à la pensée et au secret, ceux-ci des mots sans fond patinant sur un papier glacé.


Un dessin se construit sur des vestiges.

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Il ne suffit pas pour peindre de cracher de la couleur élégante, à la matière maniérée, en la structurant en croix irrégulière autour d’un milieu légèrement déplacé, comme font la plupart des médiocres auto-satisfaits de leur abstraction, qu’ils ont sans doute apprise auprès de peintres qui structuraient en croix irrégulière, etc. Quelle peinture si n’y percent pas la tragédie ou l’énigme ou tout cela en arrière, en filigrane, serrées entre la trame et la chaîne ? Des vagues masses esthétisantes noyées dans des effets diffus et obséquieux rehaussées de quelque singerie graphique primaire n’ont jamais fait la peinture. Jamais la peinture ne doit flatter sauf pour être exposée dans les magasins de meubles.

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Un peintre en peignoir

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Esprit mal tourné : lorsque l’on parle des parties intimes, je ne peux m’empêcher d’y entendre le fond de la pensée, celui de la mémoire, des secrets silencieux dans leurs replis les plus obscurs.

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Entendu malgré moi une conversation dans laquelle on évoque un film à très petit budget dans lequel « 5 figurants se battent en duel ».
Le compte n’y est pas.

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Certains livres nous donnent tellement qu’ils mériteraient non pas un signet, mais une masse de signets qui, s’ils s’en échappaient, ressembleraient à une lourde mèche, une crinière, une chevelure épaisse, et s’ils s’y inséraient tous pour nous aider à ne rien perdre, feraient tellement souffrir tranchefile et reliure que ces ouvrages ne fermeraient plus, se dessineraient courbes depuis le dos. De ces livres qui ne peuvent plus entrer sagement dans la bibliothèque, qui ne peuvent être que posés quelque part, entrebâillés, disponibles toujours.  


Nous sommes nombreux à avoir tenté de refaire le monde au cours de conversations animées, arrosées et enfumées, passionnantes, mémorables. Nous avons tous  échoué.

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 Le vieux loup hurle à la mer

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